Les Açores : une terre de feu et d’océan
Parfois, on a l’impression que la nature se joue de nous. Aux Açores, elle semble avoir décidé de rassembler en un seul archipel toutes les merveilles de la planète : lacs volcaniques émeraude, falaises sombres échappées d’un rêve, prairies grasses où broutent des vaches sereines, et ce bleu profond de l’Atlantique qui encercle chaque île comme un écrin sauvage. Naviguer jusqu’aux Açores, c’est accepter de ne plus jamais voyager de la même façon.
Ponta Delgada : le point d’ancrage
Si l’archipel des Açores compte neuf îles, c’est souvent par São Miguel qu’on arrive. Ponta Delgada accueille le voyageur avec ses ruelles pavées, un parfum de mer omniprésent et ces façades blanches bordées de basalte qui donnent aux maisons un charme unique. Une balade sur le port et bientôt, on se retrouve attablé à déguster un « bife à regional » : un steak tendre arrosé d’ail et de piment, parfait pour reprendre des forces après une traversée ou un vol agité au-dessus de l’Atlantique.
Mais il ne faut pas trop s’attarder en ville. São Miguel est une terre d’odyssées, de randonnées vers des sommets qui tutoient les nuages.
Les lacs de Sete Cidades : la légende des amoureux
Imaginez une caldeira double où deux lacs, l’un d’un vert éclatant, l’autre d’un bleu profond, se côtoient sans jamais se fondre. On raconte qu’ils sont nés des larmes d’une princesse et d’un berger, condamnés à un amour impossible. L’histoire est triste, mais lorsque le soleil inonde la vallée et que le vent fait danser les hortensias sur les rives, c’est la pure beauté qui l’emporte.
Un sentier serpente sur la crête, offrant une vue renversante sur l’ensemble du cratère. Le randonneur prend ici conscience de ce que signifie vraiment être au milieu de l’Atlantique, seul face à l’immensité.
Furnas : là où la terre fume encore
Les Açores sont volcaniques, et si le ciel est parfois tourmenté, le sol, lui, ne s’est jamais vraiment calmé. À Furnas, les geysers et les fumerolles rappellent que les entrailles de la terre ne sont jamais loin. Ici, l’eau bouillonne dans des bassins naturels, et l’odeur du soufre chatouille le nez.
Ce serait un crime de quitter le village sans avoir goûté au « cozido das Furnas », un ragoût cuit lentement dans la chaleur volcanique. Les locaux enterrent la marmite dans le sol brûlant et laissent le temps faire son œuvre. Viandes tendres, légumes parfumés, un goût unique qui condense en une bouchée toute la force de cette île hors du commun.
Pico : le toit de l’Atlantique
Au loin, un cône parfait jaillit de la mer : c’est le mont Pico, la plus haute montagne du Portugal. Gravir ses 2 351 mètres, c’est comme défier l’océan lui-même. La montée est exigeante, souvent brumeuse, mais pour ceux qui atteignent le sommet, la récompense est infinie. Si les nuages se dissipent, on aperçoit les îles voisines, toutes posées sur l’eau comme un collier d’émeraudes.
Mais Pico, ce n’est pas seulement une montagne. C’est aussi une île où l’homme a apprivoisé la lave en cultivant la vigne sur ces sols noirs et rugueux. Le vin de Pico, un blanc minéral et salin, a autrefois conquis les tables royales d’Europe. Aujourd’hui encore, un verre suffit pour sentir tout le caractère de cette terre indomptable.
Faial et la marina des aventuriers
Les Açores sont un point d’étape pour bien des marins traversant l’Atlantique. Et si l’un d’eux devait choisir un port d’adieu avant un grand périple, ce serait Faial. À Horta, la marina est un musée vivant du voyage en mer : les murs sont couverts de peintures laissées par les équipages de passage, comme une superstition, un vœu pour une traversée sûre.
Le Peter Café Sport est une institution. On y boit un gin tonic en échangeant récits et conseils de navigation. Même si vous n’êtes qu’un simple voyageur, il faut s’y arrêter. Qui sait, peut-être qu’un soir, un navigateur vous racontera une histoire qui changera votre vie…
Nager avec les géants de l’Atlantique
Les Açores, c’est aussi le royaume des cétacés. Peu d’endroits au monde offrent une telle abondance de baleines et de dauphins. Les anciens pêcheurs de cachalots se sont reconvertis en guides, remplaçant les harpons par des jumelles. Monter à bord d’un zodiac à la recherche d’une nageoire dorsale brisant la surface reste une expérience inoubliable.
Avec un peu de chance, vous croiserez l’œil tranquille d’un cachalot, ou un groupe de dauphins curieux jouant dans l’écume. Dans ces instants-là, le monde s’efface. Il ne reste que l’océan et vous.
Quand partir et comment s’y rendre ?
- La meilleure période pour visiter les Açores se situe entre mai et septembre, quand le climat est doux et que les journées sont longues.
- Les vols depuis l’Europe desservent principalement São Miguel (Ponta Delgada) et Terceira.
- Des ferries assurent la liaison entre les îles, mais le plus simple est souvent de prendre des vols domestiques.
Un dernier regard sur l’archipel
Les Açores ne se contentent pas d’être belles. Elles sont entières, brutes, imprévisibles. Ici, on apprend à écouter le vent, à lire le ciel, à respecter la mer. Chaque île a sa propre âme, et pourtant elles partagent toutes une même magie : celle d’un monde où la nature règne encore en maître.
Certains voyageurs repartent avec le souvenir d’un coucher de soleil sur une falaise, d’autres avec le goût du vin de Pico sur les lèvres ou l’écho du chant des baleines au creux de l’oreille. Mais tous ressentent cette sensation étrange, ce doux vertige qui vous murmure : ici, vous reviendrez.